Le Powerman Zofingen est un nom de légende pour les duathlètes. C'est l'équivalent de Hawaii pour le duathlon longue distance. Cette coupe du monde se déroule en Suisse sur une distance de 10 km à pied en hors d'oeuvre, 150 km à vélo sur trois boucles comme plat principal avec un dénivelé positif de 1600 m et une nouvelle course à pied de 30 km en dessert, soit 2 boucles sur un parcours très vallonné dont 70% sur des chemins forestiers... Pour la 28e édition qui s'est déroulée le 4 septembre, Eric Iten a représenté notre club et l'équipe de France ITU groupes d'âges en catégorie 55-59 ans. Il a ainsi signé à 55 ans un magnifique exploit et engrangé de mémorables souvenirs qu'il nous livre en exclusivité.
"Arrivés à Aarburg, la ville à coté de Zofingen dans le canton d'Argovie en Suisse Allemande (entre Bern et Zurich pour situer) le vendredi 2 Septembre. C'est le seul camping proche de Zofingen. Beaucoup d'agitation dans cette petite ville sur le bord de l'Aar et notamment à coté du camping car il y a en même temps que le Powerman un festival de rock métal... La scène est juste derrière le camping et en plus se tient un rassemblement de vieilles voitures Américaines "route 66"avec des groupes de Rockabilly. Dans le pays de l'horlogerie nous avons changé d' espace temps. On croise dans les rues de vieilles Chevrolets, Dodges et compagnie. Les métalleux cotoient les Rockers et les filles se prennent toutes pour Marilyn. Tout ça dans une ambiance bon enfant, pas un agent de police, ce sont les organisateurs qui assurent la circulation, pas de débordements ni de bruits intempestifs la nuit et à minuit et demi grand max plus de bruits.
Samedi AM, direction Zofingen, retrait du dossard et briefing, visite du village Powerman et repérage du parc à vélos. il y a du monde mais l'ambiance est plus feutrée qu'à Aarburg. Retour au camping et préparatifs rituels d'une veille de course. La pression monte, je viens de réaliser que c'est le championnat du monde de duathlon, heureusement les concerts à proximité et le ronronnement des Mustangs et autres Corvettes m'empêchent de stresser.
Dimanche jour J, réveil quasi instantané à 5h30. Ca va, bien dormi, pas de panique le départ est à 9h. P'tit dej traditionnel c'est à dire pâtes et jambon. Il fait encore nuit mais il fait doux, le ciel est clair, les étoiles brillent et une belle journée s'annonce. Les métalleux ronflent, on se croirait dans une forge. Nous sommes seulement 3 duathlètes dans le camping : 2 Belges et 1 français.
7 h : départ pour Zofingen, le trajet dure 10 mn, prise du matos et du vélo direction le parc à vélo pour checking. Petite surprise au moment du contrôle : étant inscrit en catégorie ITU je devrais porter une tenue de l'équipe de France pour représenter mon pays. Discussion avec l'arbitre principal lui expliquant que c'était la première fois que je participais à une épreuve label ITU et j'ignorais complètement qu'il fallait une trifonction aux couleurs de son pays. Faisant confiance en ma bonne foi, il me permet de faire la course en catégorie ITU sinon j'étais disqualifié avant même de commencer.. Petite décharge d'adrénaline, je rentre dans le parc, trouve ma place, range le vélo et les chaussures, repérages habituels. Direction la ligne de départ pour m'échauffer. Tout le monde est là, les pros et les autres. C'est la première fois que je côtoie de si près les meilleurs mondiaux. Les filles partent à 8h, encore 1 h avant de partir pour une longue journée, échauffement tranquille.
9 h : départ en côte avec 200m à 22 % à passer 2 fois (2 fois 5 km), ça part vite, très vite même, je reste sur mon rythme et limite la casse. Je suis mieux sur le deuxième tour. Retour dans le parc avec une transition correcte, je suis dans mes temps (49mn). Départ vélo (3 boucles de 50 km), les jambes tournent bien, les 15 premiers km sont plats et roulants. La première bosse arrive, elle pique un peu et je pense à la 2ème le célèbre Bodenberg à 750m d'altitude, un mur qui monte en 2 fois. Elle et la 3ème bosse se passent bien. Entre les bosses c'est relativement roulant avec un bon revêtement (les routes Suisses quoi) tout ça à passer 3 fois, je pense à mes jambes et aux 30 derniers kms qui ne sont pas tristes non plus. Je pose le vélo dans le parc après 6h 6mn. Je ne pouvais pas faire mieux car j'avais toujours les 30km de cap en vue ( à force de voir les vidéos sur Youtube). Je retrouve mes runnings avec plaisir et m'élance pour les 30 derniers km (une formalité !!!)
La tête va bien, les jambes un peu raides, la pluie vient se joindre à la fête et les crampes me bloquent à la fin du 1er km, assouplissements et étirements m'aident à repartir avec la hantise qu'elles reviennent. Ca monte quasiment sur 6 km pour arriver sur un plateau qui domine Zofingen mais la pluie gâche la vue, ensuite 1.5 km en aller-retour avec pas mal de relances un peu chiant à mon goût et retour vers l'Arena (l'aire d'arrivée) là, ça tape dans les cuisses en descente et je fais tous les ravitos. La pluie ne me gène pas du tout. Passage dans l'Arena, la tête va toujours bien et les jambes tiennent (tu refais la même chose et tu termines) je suis mieux à l'entame des 15 derniers km mais dans les bosses je marche et je m'étire. C'est bon, le plus dur est derrière... Je quitte le plateau, ce n'est plus que de la descente maintenant tant pis pour les jambes et au diable les douleurs : je sais que je vais finir dans les délais après 3h 36 de course à pied et je me fous du classement. Je rentre dans l'Arena avec la banane et je franchis la ligne d'arrivée avec une joie immense. Putain, j'ai fini le mythique Zofingen!!!!! Je réalise que je suis dans les derniers avec un temps de 10h 37 mais ça peut importe, c'est le championnat du monde !!! Je voulais faire cette course une fois dans ma vie, et j'ai réussi..."